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On sait comment le cycle des saisons fonctionne… le printemps, puis l’été, puis l’automne, suivi par l’hiver et hop on recommence. Chaque saison avec ses caractéristiques, ses activités, ses énergies, ses archétypes.
Une saison Hiver de la grossesse à la marche
Et puis il y a les grands événements de la vie. Des moments de plongée qui viennent s’ajouter au planning cosmique déjà chargé et nous laissent explorer pleinement une saison en particulier, même si le ciel et la terre changent d’apparence, nous ne sommes que dans une saison, ou une Direction, pendant plus longtemps qu’escompté.
Mon amie-guide du féminin Corinne nous avait dit, lors de notre formation à l’animation de cercles de femmes, que la femme entrait en Hiver (saison Nord dans la tradition amérindienne) de sa grossesse jusqu’aux un an de l’enfant, autour du moment où il se met à marcher.
Cela fait un an et demi que je suis en hiver, et j’ai à peine commencé à l’accepter.
Un moment de repli, de repos
Comme nous avons un printemps bourgeonnant à la mesure que l’hiver a été reposant, notre renouveau printanier post-maternité éclate à la mesure que nous avons pu laisser les racines s’engouffrer en hiver, la terre se reposer et l’humus se constituer. Pourquoi alors m’agiter, retourner la terre dans tous les sens en hiver ? Forcer le printemps à arriver quand le temps m’indique que le soleil n’est pas encore tout à fait prêt à se faire plus présent ?
Dès le début de ma grossesse, l’hiver s’est présenté, m’incitant au repos et au repli. Un gros changement pour moi qui avais passé l’année en action, que ce soit pour le travail ou les loisirs (notamment parce que je prévoyais ma grossesse et souhaitais profiter de ce temps qui m’était complétement dédié en amont). Une situation de calme et de repos qui a engendré, déjà à l’époque, beaucoup de frustrations. Ce sentiment de perdre mon temps. Ce sentiment de regarder les uns et les autres sur leur tapis de course, pendant que je sirote une eau de coco dans la partie lounge de la salle de sport, impossible de me mouvoir. Cette difficulté à s’arrêter. Cette difficulté à apprécier le repos, à lâcher prise et simplement à Être présente, dans l’ici et maintenant, en détente.
L’Hiver, cette saison mal-aimée, comme la Femme Sage
Le fait est que, rien ne nous donne envie d’aimer et d’apprécier l’hiver, au sens propre comme au symbolique. Nous vivons dans une culture où il faut agir, tout le temps, en tout point, même quand ça n’a pas de sens. C’est une saison où si peu qu’on ne vive pas dans une grande ville, on est obligé de rester à l’intérieur, de ralentir nos activités, notre vie sociale. L’hiver a pour archétype la femme sage, la « vieille » femme, celle-là même qui est sous représentée, dévalorisée, montrée même comme inutile à la société.
Nous voilà donc en saison hivernale, enceinte ou avec un bébé. Avec une forme de FOMO (Fear Of Missing Out) perpetuel. Comme si j’avais passé les 30 premières années de ma vie à buller, qu’il était maintenant trop tard et que jamais, plus jamais, je ne pourrai à nouveau m’ouvrir au monde et éclore, que mon temps était passé et que je n’étais que le souvenir d’une personne qui un jour aurait pu vraiment contribuer à la société.
Les premiers mois avec bébé ont été du même acabit. Incapable d’apprécier ce moment, à me dire que ce ne serait pas tout le temps comme ça, à voir la situation comme un cycle, un pas-sage, un instant et que lorsque ce sera le bon moment, la roue tournera pour aller au prochain bon moment, à l’Est, au Printemps, à la Jeune Fille. Comme souvent, j’ai mis le peu d’énergie qui me restait à maudire mes journées difficiles et à me projeter dans une situation meilleure, plus tard, dans quelques années, et surtout, quand j’aurai trouvé LE job ou MA mission de vie.
Accepter ce temps d’Hiver
Progressivement, au cours de l’année, j’ai pu reprendre mon souffle. Accueillir mes inspirations et trouver une présence que je n’avais plus ressenti depuis quelques temps. Cette présence qui ne peut être là que quand le calme se fait, que quand l’eau se repose et qu’on y voit vraiment le fond. Cette présence m’a rappelée mon lien avec la nature, mon besoin de ralentir, mon plaisir méditatif de l’instant, mon lien avec le centre, réellement, et ma satisfaction, mon contentement d’être là, maintenant ; exactement ce que l’archétype de la femme sage nous invite à ressentir. Aujourd’hui, 10 mois après la naissance de ma fille, je me relie vraiment à cette saison de l’hiver, je l’accepte et lui ouvre les bras avec bonheur. Cette satisfaction que je ne vis que très rarement, est la bienvenue.
Je me connecte au slow living, aux questions existentielles sur le fast living, sur la hustle culture, sur le « je veux tout, tout de suite, maintenant », sur cette société adolescente biberonnée aux séries américaines. Je me pose les questions sur ce que la société nous prend / nous vole / nous demande, en mettant tant en avant notre printemps et ses valeurs de productivité, de travail, de projet, au détriment de notre hiver et sa reprise de souffle, son temps d’apaisement, de ralentissement.
C’est en ce moment que je trouve qu’il urgent de réhabiliter la femme sage, la sorcière, l’hiver et son temps de pause et de repos. On parle de cycle féminin, du temps des règles (relié à l’hiver et à la femme sage), etc., mais sommes-nous réellement capable de ralentir, de diminuer la stimulation, la surstimulation, les divertissements, les projets, et laisser l’espace à cette femme sage, satisfaite, intuitive, calme ? En avons-nous envie ? Même, est-ce qu’on sait le faire ? Qu’est ce qui fait que nous sommes en panique quand ce temps arrive ?
Respecter le Cycle
Potentiellement, quand ma fille esquissera de vrais premiers pas, je pourrai moi aussi changer de cycle et (re)devenir « jeune fille », l’archétype du printemps. Je découvrirai mon printemps, je passerai au prochain cycle sur la roue. Je trouverai l’enthousiasme dans mes projets, du désir ardent pour aller à l’extérieur, revenir aux contacts. Me sentir adolescente, énergique. La phase de la Jeune Fille est l’archétype féminin qui est le plus socialement acceptable car le plus en lien avec l’aspect masculin.
Pour l’instant, je vis mon hiver, toujours. Un hiver qui durera, entre la grossesse et la marche de bébé, près de deux ans. Qui m’aura tant appris sur cette saison, sur cet archétype, sur l’équilibre, sur mes valeurs.
C’est ça, le respect du rythme de la nature, le respect des cycles et du Féminin. Vivre au rythme des saisons et même de ses propres saisons, les ressentir dans son ventre, savoir les reconnaître, s’y adapter, les explorer. Aller avec le flow qu’elles supposent, naviguer…et se savoir changeante, multiple, complète.
Photos : Centaurea Doula